extrait
Arrive un jour
où la main perçoit les limites de la page
et sent que les ombres des lettres qu'elles écrit
s'échappent du papier.
Derrière ces ombres,
elle se met alors à écrire sur les corps dispersés par le
monde,sur un bras tendu,
sur un verre vide,
sur les restes de quelquechose.
Mais vient un autre jour
où la main sent que chaque corps
furtivement et précocement dévore
l'obscur aliment des signes.
Le moment est venu pour elle
d'écrire dans l'air,
de se conformer presque à son geste.
Mais l'air aussi est insatiable
et ses limites obliquement étroites.
La main décide alors son dernier changement
et se met humblement
à écrire sur elle-même
Roberto Juarroz(poésie verticale)